La Dame de Pique

Peter Del'Yrino. Un nom d'emprunt, sans doute. Mais emprunté depuis tellement longtemps qu'il semble avoir remplacé l'ancien. Et pour cause, c'est par ce nom qu'il se faisait connaître de la mère de Tarek, et toujours par ce nom qu'il gère le HeartJack, casino renommé de Pink Nova (bien que Pink Nova dispose d'un certain nombre de casinos renommés), principalement en raison de son concept d'escort-girl pour la soirée à gagner au black jack pour les plus habiles, ou les plus chanceux.

Sans Peter, Tarek aurait eu du mal à obtenir la propriété de ce petit bar en faillite. Sans ce même Peter, Tarek aurait eu du mal à obtenir les diverses licences concernant qui la vente d'alcool et autres substances, qui l'emploi de strip-teaseuses, qui la protection du parrain qui règne sur le quartier. Un homme bon, Monsieur André, lui avait soufflé Peter quand ils étaient allés le voir. Un homme bon qui n'était pas contre l'idée d'un bar de ce genre. Un homme bon qui lui avait donc permis de s'installer, écartant les dernières difficultés, mais n'oubliant pas d'assurer d'un ton paternaliste que s'il accordait facilement sa confiance aux amis de ses amis, il valait mieux ne pas le décevoir.

Comme quoi, avec les bonnes relations, on peut y arriver. Les bonnes relations, et une valise pleine de billets. C'est qu'il n'en reste presque plus, de billets. A peine quelques centaines de kopekz dans cet attaché-case en cuir synthétique. Mais les stocks sont pleins, les travaux sont finis, et l'enseigne lumineuse peut étinceler dans la nuit pink novienne. Même si le bar est encore fermé, faute d'employés. Même si Peter lui a confié Maria, plantureuse serveuse, qui si elle n'est plus dans ses jeunes années, bien qu'ayant su conserver sa silhouette tout en courbes là où il faut, long cheveux bruns bouclés sur peau de café, est bien plus à l'aise que Tarek dans un milieu aussi arriviste et concurrentiel que Pink Nova.

Premier conseil, bien qu'un peu évident : trouver des employés. Et où donc ? Elle a une adresse, une agence de recrutement aux CVs pas trop trafiqués, et qui plus est ayant des accords avec monsieur André.

" Première règle : ne jamais employer de comptable, tant que tu peux faire les comptes toi même. Deuxième règle : si tu es obligé de prendre un comptable, prends en deux. Comme ça, si l'un trafique quelque chose, l'autre viendra te prévenir en espérant une récompense. Règle numéro trois : Si ça arrive, récompense le. "

Maria le guide dans les ruelles bondées de touristes en tout genre, vendeurs à la criée ou à la sauvette, au milieu des enseignes luminescentes, parfois aussi surprenantes que cette femme nue tatouée à l'encre bioluminescente qui ondule, en équilibre sur une barre fixe au dessus de l'entrée du bar.

" Par contre, il faudrait que tu me ré expliques un peu ton concept. Histoire de bien cibler les employés. Tu en as bien un, j'espère ? C'est le seul moyen de sortir un peu du lot, sinon tu ne tiendras qu'un bar parmi tant d'autres dans lequel le chaland entrera au hasard. Et dans le business, on ne compte pas sur le hasard. Règle numéro quatre. "

Et tout en continuant à le guider dans les rues, Maria lui lance un clin d'oeil complice et maternant.

L’anonymat.

Répondit Tarek en continuant à marcher dans les rues en écartant les nombreux touristes de la main droite et fumant une cigarette avec l’autre.

Les clients sont tous, sans exception, invités à porter en permanence des masques. Le principe à comme avantage de satisfaire dans un premier temps ceux qui veulent se faire oublier et passer du bon temps sans attirer l’attention et dans un second temps ceux qui veulent éviter la mauvaise presse.

J’imagine et j’espère que ça attirera un minimum de public.

Evidement il y a le révère de la médaille. Quand on attire les gens qui auraient mieux fait de rester dans leur trou on s’expose à des problèmes.

Tarek tira un grand coup sur sa cigarette et continua.

Je ne veux pas que le club devienne un repaire malfamé fuit par le client lambda et désagréable pour mes employés. Je veux suffisamment de gros bras pour que tout le monde reste à sa place. Les gens sont là pour assister à un spectacle, pas pour y participer. Ils sont là pour consommer des boissons et tout ce qu’ils veulent bien s’injecter dans le sang ou les sinus mais pas pour agripper les vêtements d’une serveuse et vomir dans le pantalon d’un client.

Bref, ni un bordel ni un putain de repaire de pirate.

Attendant qu’un feu de circulation passe au vert, Tarek les mains dans les poches continua son explication.

Si ça marche on risque d’avoir affaire aussi à une tripoté de curieux en tout genre qui se sentirons attirer par tout ces masques. Encore une fois il faut des gens pour veiller au grain à l’intérieur mais aussi pour raccompagner gentiment ceux qui viendraient pour le travail plutôt que pour la détente. Pas de journaliste et pas de fouille merde. Mais ça n’est pas pour tout de suite, autant se concentrer sur les premiers mois du club.

Tarek reprit la marche.

Même si ça risque de nous couter du client je pense qu’il vaut mieux n’accepter que les gens habillé sur leur 31. Qu’on se comprenne bien, pas forcément habillé avec luxe, mais présentable et plus ou moins propre.
Je n’ai jamais supporté les gens qui viennent dans un club habillés en tenue de travail encore dégoulinante de merde pour baver devant des filles, le tout la morve au nez et une bouteille de synthé-vinasse dans le bec.
Mais ça, Maria, nous verrons bien quels sont les clients qui viendront en premier. Le club doit tourner et rapporter des l’argent avant de faire du tri dans les clients.

Traversant une autre rue, arrivée enfin aux arbores de la dame de pique, Tarek s’apprête alors à rentrer dans l’édifice remis à neuf. Mais avant il s’immobilise, éteint sa cigarette en l’écrasant sous sa semelle et continue sa conversation avec Maria.

J’ai dans l’idée d’acheter quelques désynthétiseur de voix. Tu sais, ces gadgets qui permettent de modifier sa voix en les plaçant devant la bouche.
Pour les clients qui veulent vraiment masquer leur identité, par jeux ou par intérêt. Le club pourra toujours les louer pour quelques Kopekez de plus. Je vais voir ce que je peux trouver là dessus sur le Rhézo.

Ah, et à propos. Maria, si tu as des connaissances sur qui on peut compter et qui sont à la recherche d’un emploi, envoi les moi dans mon bureau, à l’étage. Je vais contacter l'agence dont tu m'a parlée mais j'aime aussi engager des gens dont on sait d'où ils viennent.

Citation :

HRP :

Si Maria clos la conversation :

- Tarek fait un petit tour du proprio
- Il se dirige vers son bureau et tente d'appeler l'agence
- Ensuite il fait une recherche sur des masque pas cher, sobre et qui masque la plus grande partie du visage.
- Ensuite il faire une autre recherche sur les désynthétiseur de voix

" C'est un concept original, mais il va vraiment falloir être prudents les premières semaines, pour éviter le dérapage. Il faut que tu réussisses à te faire une clientèle d'habitués d'un certain standing. Une fois que ce sera fait, ils devraient se renouveler d'eux même, par bouche à oreille. Et il faudra faire un coup de pub aux endroits qu'ils fréquentent ... J'en parlerai à Peter. "

Maria en profite pour s'allumer elle aussi une cigarette, tandis qu'ils sont debout devant l'entrée de la Dame de Pique.

" Je vais envoyer un message à un vieil ami, je crois qu'il n'a rien à faire ces temps ci. Un agent de sécurité très efficace. Enfin, reste à voir si tu crains que sa tête fasse fuir les clients. Mais n'aie pas peur de l'agence, c'est elle qui fournit la plupart des commerces de Monsieur André. Et Monsieur André n'embauche pas de petites frappes. Tu chercheras dans leur base de donnée s'il y a des profils qui t"intéressent, tu pourras y voir toute leur vie : où ils sont nés, ce qu'ils ont fait jusque là, leur casier ... Bien qu'il soit très rare qu'ils acceptent un repris de justice. "

Maria fait une pause, prend une longue inspiration puis expire doucement un mince nuage de fumée. Un demi-sourire lui tord les lèvres.

" Et prends plutôt des demi-masques que des complets : faudrait pas empêcher le client de consommer. "

Elle sortira ensuite son holo-com, un modèle assez vieux d'un rose fushia éclatant en laissant Tarek se rendre à son bureau. Quand Tarek aura fait le tour du propriétaire, vérifiant que tout est bien en place, il découvrira la gigantesque base de donnée de l'agence, avec des critères de recherche aussi variés que les qualifications, la couleur de cheveux ou même le tour de poitrine. Visiblement, il y trouvera ce qu'il cherche. Quant au masques, il existe de multiples modèles, de coloris et de formes différentes, complets ou recouvrant juste le visage du haut du front jusqu'au nez, ainsi que des loups. Il lui faudra aussi faire un choix entre des masques réutilisables, et d'autres, jetables après utilisation. Quant aux désynthétiseur de voix, ils ont l'air d'être encore un peu chers pour son budget, surtout avec les premiers salaires qu'il faudra payer.

HRP: Je te laisse donc faire une description des lieux, avec plan à l'appui si nécessaire. La base de donnée de l'agence étant extrêmement exhaustive, je te laisse aussi inventer les quelques employés auxquels Tarek devra faire passer un entretien avant de les embaucher.

La carte

Spoiler:

Merci pour tes conseils Maria, je vais y réfléchir. Que ton ami me passe un coup de téléphone si ça l’intéresse pour prendre rendez vous, qu’on discute.

Je t’attends lundi prochain vers 14h pour un premier briefing avec les employés. Ton expérience leur sera sans doute aussi utile qu’a moi. Passe par la porte derrière.

Tarek chercha dans sa poche la carte d’accès accrochée à son trousseau de clé.

A bientôt.

Fini t-il en glissant sa carte dans le lecteur, déverrouillant l’épaisse porte d’entrée du club.
La dame de pique est un vieux club remis à neuf. Ca se sent dans l’air, l’équipe de nettoyage est passée dans la journée.
Passé la porte d’entrée, le propriétaire se glisse dans le hall ou un long couloir tournant vers la droite suivant les vestiaires et le guichet.

Ce dernier est une sorte de forteresse miniature sortant légèrement de la façade pour s’offrir aux clients. Une vitre blindée, un micro et son hautparleur externe et de lourds barreaux de synthé acier encadre la structure de béton. On ne plaisante pas avec la sécurité, les gens ne supportent parfois pas de se voir refuser l’entrée ou essaye tout simplement de vider la recette de la soirée.

Tarek passe devant les vestiaires, ils sont vides. Des cintres semblent attendre en s’ennuyant depuis plusieurs mois.
Ici, si les gens qui ne sont pas venus masqués enfileront les masques. Pense-t-il.
La visite se poursuit.

La grande salle s’illumine quand Tarek met la main sur l’interrupteur. Le rouge des murs et le tapis noir rappel les couleurs du jeu de carte. La scène est plutôt jolie, un peu classique mais pas dénudée de charme. Plusieurs barres de danse la parcours la barre horizontale du T que forme le devant de la scène.

Sur la gauche, le comptoir, pour y passer il faut passer par la salle des videurs. C’est plutôt pratique, ça permet de garder un œil sur ceux qui vont Tarek enjambe le bar pour vérifier que les frigos et tout le matériel sont fonctionnels.
Bien, le service technique est aussi passé pour remplacer les appareils défectueux et entretenir le reste.
Dans la grande salle il y a un miroir qui fait mur avec la salle des videurs. Bien entendu c’est un miroir sans tin pour garder un œil sur se qui se passe dans la salle.

Le jeune homme ouvre la porte de cette dernière salle. Il y reste quelques tables et un système de sécurité basique. Quatre postes de télévision pour quatre caméras. Une devant l’établissement pour observer les clients qui arrive, une autre dans le hall d’entrée, une troisième dans les coulisses et une dernière qui donne sur la ruelle derrière l’établissement. Un système de bouton permet d’ouvrir automatiquement la porte si la personne qui à sonnée à la porte de derrière est quelqu’un que l’on connait ou que l’on attend.

Tarek remarque aussi une petite armoire en métal.

Typique, souris t’il.

C’est dans ce genre d’armoire que l’on cache batte de base ball et autre armes contendantes pour calmer les clients un peu trop agressif. Pour le moment, elle est vide.

Le propriétaire quitte la salle des videurs pour entrer dans les coulisses.

La majorité des décors et autres objets encombrants sont entreposés ici. Malheureusement avec la faillite de l’ancien club, beaucoup à été vendu séparément et il ne reste que les invendus. Un lourd rideau noir sépare les coulisses de la scène rouge. C’est par ici que passe les filles lorsqu’elles rentrent en scène. Et c’est aussi ici qu’un ordinateur permet de gérer les divers éclairages et les musique diffusées durant la soirée.

Dans un coin à gauche plusieurs caisses ont étés livrées. Les alcools, tout simplement. Que serait un club sans alcool ?
Tarek jette un œil aux bouteilles en ouvrant l’un des cartons. Tout semble en ordre.

Il continue vers les escaliers mais passe vers la droite et rentre dans les loges.
Quelques miroirs, juste assez de matériel de maquillage et de costume affriolants pour travailler correctement.
Avançant dans la pièce doucement éclairée par une lumière jaunâtre, Tarek se glisse entre deux miroirs et ôte un trompe l’œil pour laisser apparaitre un œil de chat.

Il regarde au travers. D’ici on peut voir toute la salle, les clients et surtout la scène. Tarek à demandé que le service technique les installes pour que les employés puissent savoir se qui se passe dans la salle sans être vu. Il y a le même œil de chat un peu plus loin, il donne une vue sur les toilette.

Tarek repens à la voix interloquée du technicien qu’il a eu au téléphone quand il lui à expliqué se qu’il voulait.

Un quoi ? Ou ça ?

Fallait-il vraiment lui expliquer que les individus louches utilisaient souvent les toilettes pour sortir on ne sait trop quel arme d’on ne sait trop ou ? On ne pouvait tout de même pas mettre un agent de sécurité dans les toilettes sans choquer le client.

Tarek à vu se qu’il voulait. Le club est en ordre, en état de marche. C’est le principale.

Il retourne vers les escaliers des coulisses. Et emprunte celui qui descend à la cave. Ici il y a bien sûr le système de chauffage, la tuyauterie et la réserve. Mais, plus étrangement il y a aussi une petite salle complètement insonorisée. Impossible d’entendre la musique diffusée plus haut ou d’entendre dans le club un bruit quelconque diffusé ici.
Tarek songe.

L’ancien propriétaire devait souvent avoir des comptes à régler pour avoir une salle telle que celle-ci. Mais, qui sait. Pensa-t’il. Ca pourrait toujours être utile.

Le premier étage est bien plus petit que le rez-de-chaussée : un long et unique couloir qui donne sur trois pièces. Une pièce de rangement en tout genre, pour le moment vide. Une chambrette avec juste assez de place pour un lit d’une place, un petit bureau ainsi qu’un évier. Les deux chambres sont maintenant fermées à clé.

La dernière pièce, au fond du couloir, est le bureau du propriétaire. Bureau qui fait aussi office de domicile puisque au fond de ce bureau on retrouve une petit pièce ou il y a un lit, un frigo ainsi qu’une douche.

Tarek s’assied sur la chaise de son bureau. Il sort son comm pour parcourir le Rhézo à l’aide de l’adresse que lui à confié Maria.

Il réfléchit.

Il lui faudrait un minimum de 6 agents de sécurité. Au moins 8 filles pour qu’elles puissent se relayer, 2 personne pour la prise en charge du nettoyage ainsi qu’un barman et 2 serveuse pour appuyer Maria et 2 personne pour prendre en charge la vente des ticket et les vestiaires.

Après une longe recherche et plusieurs mégots de cigarettes écrasé dans un cendrier en fonte, voici ce qu’il en ressort.

6 Agents de sécurités

- Fred Telling (Humain – belle année de service de videur dans une boite de nuit)
- William Longfellow (Félynoïde- ancien militaire)
- Samuel Garcia (humain- plusieurs année de travail pour monsieur André]
- Gornel Finest ( Simiens [ou Ork, c’est selon] femelle ayant travaillé comme videur sur Dimaris]
- Mace Rendest (Nexus - ancien militaire)
- « L’ami de Maria »

8 danseuses

- Camille Littleton (humaine)
- Sandra Fender (humaine)
- Questine Hapendel ( félynoïde)
- Gwendoline Janis (félynoïde)
- Catherine Geld (cent visage)
- Laura Emindel (cent visage)
- Dana Hellding (humaine)
- Melissa Feps (humaine)

Citation :

*Description physique et antécédent à la discrétion du MJ*

2 Personne pour le nettoyage

- Cédric Mistigrette
- Sonia Mistigrette (un couple de Malaxian, un peu perdu sur Pink Nova)

Une barman ( maid ? ):

- Nicole Landuit (une humaine assez recommandée pour ses cocktails assez réussit)

Deux serveurs-euses :

- Eric Smither (un cent visages ayant travaillé chez monsieur André)
- Nadia Stuart (une humaine avec quelque année de bar)

Vestiaire et Ticket

- Garry Donatello (un humain aussi grand et épais qu’une armoire à glace)
- Xavier Gelinis (un félynoïde « zut quoi je sais plus quoi dire »)

Tarek envoya à l’agence une description des activités et de l’établissement ainsi que toutes les informations administratives.

Enfin, pour les masques il préféré commander deux modèles jetables : une caisse de loups et une autre de complet s’arrêtant au niveau du nez.

Sur ce, la journée fut longue et il la finit sur son lit, endormit tout habillé. Ses yeux se fermant d'eux même.

Aie ...

S'endormir avec une arme dans le pentalon fait mal. Oui.

Il se releva en maugréant les orteils de Mutha, enferma l'arme dans le tiroir de son bureau et retourna dans l'autre monde.

L'appel avait été assez matinal. Peut-être trop au goût de Tarek. La discussion avait été brève. Il s'appelait Kaleb Wade, il était ancien joueur professionnel de SuperBowl, et son amie Maria lui avait donné le numéro. Et il était disponible au moment où Tarek le désirerait pour un entretien.

A l'heure décidée par le gérant de la Dame de Pique, la sonnette retentira, et les caméras de sécurité afficheront l'image d'une armoire à glace de près de deux mètres, aux cheveux bruns piqués de gris en brosse, vêtu d'un imperméable noir et affichant d'impressionnantes cicatrices sur son visage au nez bien évidemment cassé.

Il aura une poignée de main féroce, mais pas volontairement douloureuse, et saluera respectueusement son peut être futur employeur en attendant que celui ci débute l'entretien.

Kaleb hoche presque imperceptiblement la tête. Et réponds d'une voix grave, légèrement rocailleuse.

" Le principe me semble correct. Faudra voir c'que ça donne au niveau des chiffres, mais sinon ça m'va. J'ai pas encore eu à gérer des gars par contre, mais ça d'vrait pas être trop compliqué.

Faudra m'montrer les installations, aussi. "

Une latte de plus. Diane aspira la fumée avec délectation, dans un geste lent et sensuel. Ca en attirait certains, une femme qui fume. Bien sûr, cela en repoussait d'autres, mais c'était comme tout. On ne pouvait pas plaire à tout le monde. Ou du moins on ne pouvait pas faire les même choses avec tout le monde. Et là, on pouvait essayer d'avoir le beurre et l'argent du beurre. Dire blanc aux premiers, noir aux seconds. A quoi bon être naturelle tout le temps ? Ca n'amenait à rien. Ils n'allaient de toute façon pas aller rapporter et comparer leurs discussions avec elle les uns les autres. Le mieux était de faire ce qu'on aimait seulement en étant seule, et dans le doute de bien le faire. C'était une façon de s'entraîner comme un autre. C'était ainsi qu'elle avait fait, au début. Tout son être devait appeler, et on ne pouvait pas passer du tout au rien en un claquement de doigt. Elle ne pouvait pas faire comme dans un conte de fée stupide où une souillon de Tacos Favellas se transformait en aristocrate avec sa poubelle déguisée en navette spatiale pour aller dans une soirée huppée du haut de la Méchapitale. Son travail de femme dédiée au plaisir des hommes lui collait de toute façon à la peau, qu'elle le veuille ou non. Peut-être pas à ce point, mais on voyait que séduire était quelque chose qu'elle savait faire. Elle attirait indéniablement l'oeil, même ainsi, enfermée dans son manteau en cuir marron foncé trop grand. C'était son don. Merveilleux. Elle s'était certes entraînée, mais de toute façon aucune chance de se leurrer ; elle était incapable de faire autrement. C'était quelque chose de naturel... que l'entraînement adaptait juste aux circonstances.

« You say I'm stuck somewhere back... »

Elle était adossée au mur, son manteau de cuir s'arrêtant en haut de ses cuisses ne laissant dépasser qu'un centimètre à peine du bout de sa robe. Court était un doux euphémisme, mais au moins le vêtement laissait entendre qu'elle portait bel et bien quelque chose sous sa veste. C'était dommage pour l'imagination, mais elle pouvait toujours y remédier en tirant un peu sur le dessus. Après. Pour le moment elle s'octroyait un court instant de détente, même si l'efficacité de la chose restait à démontrer. Une cigarette, de la musique à chantonner dans son lecteur mp troy, mais ce n'était toujours pas suffisant. Ces derniers jours avaient été éprouvants, et elle ne s'y voyait pas vraiment clairement. Elle était partie, avec ses maigres économies. Bien habillées, oui, bien payées, non. Diane avait dépensé tout ce qui lui restait dans un hôtel pour ne pas trop trainer dehors. Le premier soir, elle l'avait fait, mais elle ne pouvait pas se permettre de dormir par terre. Ce n'était pas vraiment apprécié, à Pink Nova. Les touristes s'effondrant par terre étaient diligemment conduits à leurs hôtels par du personnel de la planète spécialement dédié à cette tâche, et les sans abris reconduits à l'astroport par des policiers également dédiés et le plus souvent déguisés en personnage plus ou moins loufoques. Elle n'avait pas besoin de ça, aussi elle avait trouvé dès le lendemain l'hôtel le moins cher possible pour y rester quelques jours. Le moins cher possible... c'était amusant à dire. Elle n'avait plus rien. Mais au moins, elle avait pu prendre une douche et repasser ses vêtements. Bien présenter, toujours bien présenter. Surtout qu'elle avait peut-être trouvé une possibilité d'avenir.

Ca avait été étrangement simple. Bien plus simple que pour trouver l'établissement de Madame Butterfly, à bien des égards. Mais dans le fond, c'était logique, depuis le temps qu'elle travaillait à Pink Nova. A force, on fini forcément par se faire à l'environnement, par connaître des gens, les rues, et noter les changements. Justement. Elle savait depuis quelques jours qu'un nouveau club semblait se monter. Elle avait vu des équipes de technicien y entrer avec certains matériaux ne trompant pas. En interrogeant l'air de rien les gens du quartier, elle avait obtenu confirmation. Ce n'était pas rare que de nouveaux établissements se montent. Qu'ils réussissent l'était bien plus. Mais c'était déjà quelque chose. Un possible point de départ pour elle. De toute façon elle ne pouvait pas vraiment faire la fine bouche. Quelqu'un qui commençait, avec un peu de chance qui ne connaissait pas encore bien la planète... cela lui laissait une occasion. Il y en avait tellement peu qu'il aurait été dommage de ne pas la saisir.

Diane tourna légèrement la tête, jetant du coup de l'oeil un regard à la glace formant la devanture du bar à côté duquel elle était adossée. Impeccable, comme toujours. Elle avait remis ses cheveux blonds tombant sur ses épaules en état à l'hôtel, les brossant pour entretenir leur brillant et leur légèreté habituelle. Pour le maquillage ça n'avait pas été beaucoup plus compliqué, mais elle avait dû se rendre dans un magasin de beauté dans un quartier voisin pour se servir des produits proposés en essayage afin de faire quelque chose de correct. Sur Pink Nova, les couleurs les plus simples étaient cependant les plus difficiles à trouver. La jeune femme avait dû faire plusieurs magasins pour se débarrasser des paillettes sur l'ombre à paupière noire, trouver du mascara qui ne soit pas bleu électrique, ou du rouge à lèvre naturel plutôt que du rouge intense ou orange pétant. Elle avait peut-être été prostituée, mais ce n'était pas pour autant qu'elle devait se confondre dans la vulgarité. Ca ne lui avait jamais convenu, et ne lui conviendrait probablement jamais. Même si c'était un sacrifice qu'elle était prête à faire, elle aurait probablement trouvé ça stupide. Le noir soulignait parfaitement bien ses yeux bleus verts, le rouge à lèvre rose foncé lui allait parfaitement bien au teint. Par bonheur elle n'avait pas eu besoin de remettre du vernis à ongle, car encore une fois elle aurait eu de quoi faire de longues recherche avant de trouver quelque chose lui convenant. Son milieu jouait sur l'apparence, elle ne pouvait pas la négliger. Il aurait bien entendu été bien plus simple d'acheter ce qu'il lui fallait dans le premier magasin, mais... elle n'avait même pas de quoi. D'autant plus que même le moins cher restait inabordable pour elle. Pink Nova, ses charmes, ses attrapes touristes...

« J'espère au moins qu'ils auront du maquillage. »

Elle avait marmonné dans son absence de barbre, à voix basse, avant d'éteindre sa cigarette dans une poubelle décorée proche. C'était le moment. Le futur club était en face d'elle, de l'autre côté de la rue qu'elle traversa prestement d'une démarche typiquement féminine. Elle marchait sur des bottes noires à talons aiguilles avec une aisance infinie, comme si c'était tout à fait naturel. A force, ça le devenait. En observant la façade Diane avait repéré un panneau demandant aux artistes et au personnel d'entrer par l'arrière, via une ruelle moins fréquentée que l'artère principale. C'est par là que la jeune femme se dirigea, tout en fourrant les écouteurs de son mp troy maintenant éteint dans une poche de son manteau. Elle sortit également habilement une pastille à la menthe de son autre poche, avant de la mettre dans sa bouche et de la mâcher à la hâte. Le pire était qu'elle détestait ces pastilles qu'elle mâchait tout le temps. Mais après une cigarette, il fallait bien. C'était mieux que de se gâcher totalement le plaisir avec une de ces saletés de cigarettes à la menthe. Enfin... Dès qu'elle considéra que cela suffisait, Diane avala la pastille tout rond avec une légère moue de dégoût. L'apparence, l'haleine, les dents blanches... Elle tira légèrement sur son manteau de cuir, le faisant descendre sous sa robe, tout en ouvrant le haut pour laisser apparaître un décolleté en V très plongeant. Comme si la tenue imitation entrelacs de fils mécaniques n'en montrait déjà pas suffisamment entre deux « câbles ». Au moins, c'était de la bonne qualité. Du luxe. Elle présentait bien. Ne pas l'ouvrir trop non plus, ce n'était pas un client mais un futur patron. Il fallait juste de quoi laisser entendre qu'il y avait effectivement quelque chose à voir. Il devait penser à ce que les clients, eux, pourraient voir en elle. Lui-même pouvait s'y intéresser autant qu'à une chaussette, ça n'avait aucune importance. Effacer l'air ennuyé de son visage, un sourire avenant, un air intéressé... quelqu'un d'autre aurait probablement pensé également à l'air sûr de soit, mais cela au moins ne la quittait jamais. Préparer un bonjour enthousiaste - mais pas trop, il ne fallait pas lui sauter au visage non plus. Et maintenant... se lancer.

Un bras gracieux alla appuyer sur la sonnette. En espérant qu'elle n'aurait pas à tout recommencer pour un autre club, car cela ne l'intéressait décidément vraiment pas. Elle savait pourtant très bien que ce ne serait pas simple. Elle ne passait pas par une agence de recrutement, aussi elle devrait vraiment faire bonne impression. La jeune femme était toute seule pour se vendre. Ca lui avait paru plus prudent de se faire un peu oublier. Elle n'avait pas vraiment confiance en ce qui était déjà en place sur la planète. Allez savoir pourquoi.

Si Kaleb garda un visage neutre sous le regard de son employeur, les autres sens de ce dernier ne lui permirent pas d'y déceler grand chose d'autre. L'homme ne semblait pas être un grand émotif, et ne s'émouvait pas trop de tant de confiance placée en lui.

Face à l'arme à feu, il haussa un sourcil.

" Faites gaffe à qui peut vous voir quand vous sortez ça. Y a d'aut' moyens tout aussi efficaces mais autorisés qu'on peut utiliser, sans risquer d'se faire jarter d'la planète. "

Exhibant un instant le taser qu'il portait à la ceinture, il emboîta le pas à Tarek. Un hochement de tête aux différentes instructions, des regards attentifs jetés ici et là pour mémoriser l'agencement des pièces, et le colosse aux visage balafré se place en retrait de Tarek tandis que celui ci répond à l'intercom.

La réponse ne fut pas immédiate, mais la jeune femme ne montra pas de signe d'agacement ou d'impatience pour autant. Elle savait d'expérience que pour peu qu'aucun portier ne soit déjà engagé, il y avait généralement un certain chemin à parcourir jusqu'à l'entrée. Certains installaient leurs intercoms partout dans le club, mais elle avait toujours trouvé ces gens un peu dérangés. Se faire attendre n'était pas plus mal. Un conseil des plus classiques, se faire désirer, une base. Mais une base sur laquelle étaient construits beaucoup de choses. Et pendant ce temps, elle s'interrogeait. Elle espérait juste ne pas mettre les pieds dans quelque chose de pire que ce qu'elle avait connu précédemment. Il y avait tout de même peu de chances ; dans l'ensemble les conditions de travail sur Pink Nova n'étaient pas si mauvaises que ça. Epuisantes souvent, oui, mais au moins on n'était pas poursuivis pendant les rares congés qu'on possédait. Intérieurement elle secoua la tête. De toute façon, elle n'avait que peu d'options. Diane avait tendance à toujours envisager le pire, mais c'était une simple protection. La déception était moins dure à encaisser ainsi. C'était aussi pour cela qu'elle n'avait pas quitté le bordel de Madame Butterfly plus tôt ; elle ne pensait vraiment pas avoir la chance de trouver quelque chose de valable ailleurs. C'était juste impossible d'y croire, depuis le fond de son trou. Remonter la pente ? Impossible. Mais maintenant qu'elle était lancée...

Autre chose l'inquiétait ; d'après les quelques informations qu'elle avait recueillies, le propriétaire du club était un homme. Un changement notable par rapport à ce qu'elle avait connu. Maintenant qu'elle essayait de faire autre chose, elle espérait juste qu'il ne lui demanderai pas de faveurs. Elle n'appréciait pas l'idée que son passé la poursuive toute sa vie. D'une certaine façon ce serait évidemment toujours le cas, mais elle n'était pas obligée d'accomplir les mêmes actes. Diane n'avait jamais travaillé avec des hommes auparavant. Ils n'avaient jamais été autre chose que son travail, ou des gens aux regards intrusifs dans la rue. Il y avait eu Kyle. Mais c'était tout. On ne pouvait pas dire qu'il ne la regardait pas comme une femme attirante, mais on voyait bien qu'il n'y avait pas que cela. Pour celui-ci, cela restait à voir. Peut-être qu'il respectait une certaine règle, ne pas toucher à son propre business. Peut-être pas. Dans un cas comme dans l'autre, elle ferait avec. Si c'était la seule façon de réussir qui s'offrait à elle, alors la jeune femme ferait un effort. De toute façon, ce n'était pas si terrible. De toute façon, elle l'avait déjà fait tant de fois... Le tout était de ne pas quitter son but des yeux.

Parfois, Diane se surprenait à se demander ce qu'aurait été sa vie sur Dimaris. La planète des femmes... Comme une inversion des rôles. Elles passaient pour folles sur Pink Nova. Mais pour sa part, c'était bien les habitants de cette minuscule planète qui ne tournaient pas rond. Ca aurait pu être bien, oui. Ou peut-être pas. Plus violent, et pas forcément libre pour autant. Elle avait rêvé comme beaucoup avant elle de savoir se battre, de vivre des aventures, toutes ces choses. Mais ce n'était pas pour une fille comme elle. Elle devait juste tenter de s'en sortir. D'autant plus que son expérience des femmes au bordel n'avait pas été des plus réjouissantes. Peut-être que cela la mettait plus à l'aise car elle y était plus habituée, mais elles ne valaient pas mieux que les hommes. La jalousie, la délation et les coups dans le dos étaient légion. Elle-même n'était pas aimée. Mais elle ne s'était jamais laissée faire. Hors de question de se laisser marcher sur les pieds par des pimbêches pareille. Diane ne savait faire que ça ; les considérer comme des rivales. Et là-bas, elle avait été la meilleure de cette petite compétition. Ne pas aimer le milieu n'empêchait pas de vouloir tirer son épingle du jeu, seule au milieu de cette folie. C'est à ce moment qu'une voix d'homme sortit de l'intercom, coupant net le court de ses pensés. On y était.

« J'ai cru comprendre que vous cherchiez du personnel. »

Une voix plutôt agréable, avec une certaine chaleur contenue. Ca aussi, elle le gardait toujours même en parlant moins bien et plus franchement. Ca avait toujours amusé Kyle. Au moins, cela permettait de toujours apparaître agréable, sans pour autant trop en faire. Ca n'aurait pas détonné dans un salon plus chic. Jamais elle ne pourrait prétendre venir de la haute société, mais la fréquenter ne lui était pas interdit non plus. Pas comme certaines qui passaient en permanence pour des traînées. Sensualité, pas vulgarité comme le disait une certaine femme tant haïe mais aux conseils parfois bons.